Actualité du Sud de l'Aisne et de ses environs

Une visite à - 490m ! (Bure 55)

21 novembre 2013
Bure (55)

 Dans cette aventure, il a été le facilitateur. Lors de la tenue d’une permanence en mairie de la Chapelle Monthodon au printemps dernier, le Député Jacques Krabal avait proposé aux habitants présents une visite du Laboratoire souterrain de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) situé à Bure dans la Meuse. Kézako que ce labo ?
l faut d’abord savoir que l’Andra est un établissement public chargé de la gestion à long terme de l’ensemble des déchets radioactifs produits en France. Placée sous la tutelle des ministères chargés de l’Industrie, de la Recherche et de l’Environnement, l’agence exploite des centres de stockage adaptés aux déchets les plus faiblement radioactifs. En application du principe du pollueur-payeur, l’Andra est financée par les producteurs de déchets radioactifs (centrales nucléaires,  usines de traitement, laboratoires de recherches, hôpitaux…).

La loi du 30 décembre 1991 a confié à l’Andra la mission d’évaluer la faisabilité d’un stockage de déchets radioactifs de haute activité (HA) et de moyenne activité à vie longue (MA-VL) en couche géologique profonde dans une logique de réversibilité notamment grâce à la réalisation de laboratoires souterrains.
Implanté depuis 2000 à la limite de la Meuse et de la Haute Marne, cet outil unique de recherche est situé à 490m de profondeur. Ses galeries souterraines permettent d’étudier dans son milieu naturel une couche d’argile vieille de 160 millions d’années. La loi du 28 juin 2006 a ensuite chargé l’Andra de concevoir et d’implanter un centre de stockage profond pour ces déchets, appelé Cigéo (Centre industriel de stockage géologique), qui, s’il est autorisé, serait situé à proximité du Laboratoire.
  Quatre habitants de la Chapelle Monthodon, dont le maire du village, sont donc allés voir dernièrement à quoi ressemblait ce que certains appellent un «cimetière nucléaire». C'est parti pour... 4h30 de visite !
Pour renseigner les visiteurs,  une équipe de conférenciers composée de géologues, chimistes et biologistes a été constituée. Ces derniers se sont en outre spécialisés en vulgarisation scientifique. «Notre travail consiste à dire simplement des choses compliquées» précise Eric Poirot, géologue et guide des quatre odoniens.
Si les visites sont accessibles à tous, il vaut mieux être en bonne santé comme dirait l’autre. Claustros, s’abstenir ! Après une présentation du projet et avant d’entamer la descente à moins 490m, il faut suivre une formation. Comme on ne sait jamais ce qu’il peut se passer au fond, on vous dit tout sur l’APEVA (appareil d’évacuation autonome), un dispositif de protection personnel contre la pollution de l’air qui permet de respirer pendant environ 20 minutes dans une atmosphère létale et sur un appareil alertant la surface si vous vous retrouvez en position horizontale. Au fond, vaut mieux être prudent.
On ne descend pas à la «mine» en costard-cravate. Enfin si, c’est possible, mais sous protection. Perception donc d’un paquetage comme au bon vieux temps du service militaire ! Bottes en caoutchouc, blouse blanche, gilet de sécurité, casque avec la charlotte qui vous va à ravir et le fameux APEVA pesant 3 tonnes ! «On ne le sent plus au bout d’un certain temps» confie le géologue. C’est dans cet accoutrement que s’effectue la descente en ascenseur dans l’un des deux puits d’accès. Il faut compter cinq bonnes minutes pour toucher le fond.
Suite à la loi de 2006, les expérimentations techniques et scientifiques portent sur l’étude et le comportement de la roche après creusement, le test de nouvelles techniques de creusement, avec cette année un tunnelier pesant 180 tonnes et dénommé «Jacqueline». Jacqueline est le prénom de l’épouse du maire de Bure. C'est elle qui a baptisé la machine avant sa mise en service. Le tunnelier a été découpé en une centaine de pièces pesant moins de 5 tonnes chacune afin qu’elles puissent être descendues dans la cage d’ascenseur du Laboratoire souterrain.
Le soutènement des galeries était au départ assuré par des arches métalliques associées à du béton projeté sur la roche. A partir de 2010, des galeries ont été construites uniquement revêtues de béton. Depuis juin 2013, les dents de la Jacqueline ont commencé à creuser la roche argileuse. L’outil de coupe est capable de balayer tout le front de taille sur plus de 7m de diamètre. La galerie ouverte est maintenue par des voussoirs : des arcs préfabriqués en béton armé, épais de 45cm, larges de 80cm. Il en faut huit pour constituer l’anneau de soutènement. A la fin de l’année le tunnelier aura ainsi creusé une première galerie-test de 83m de longueur. Une seconde galerie perpendiculaire à la première est programmée fin 2014. L’Andra disposera ainsi de mesures dans les deux directions où les poussées de la roche sont soit les plus faibles soit les plus fortes. «Nous comparons le comportement de ces différents soutènements» indique Eric Poirot. Essais de creusement d’alvéoles de stockage pour les déchets HA, essais thermiques, comportement des matériaux dans la roche (verre, acier, béton), interactions entre les matériaux et la roche sont également analysés par les scientifiques. 48 ouvriers sur un total de 150 personnes que compte le site travaillent ainsi en 3x8.
Après une remontée à la surface, s’enchaîne au pas de charge une visite de l’Espace technologique. Celui-ci, situé tout près sur la commune de Saudron en Haute-Marne, abrite les prototypes de robots, de conteneurs et de machines développés pour stocker les déchets de haute activité et de moyenne activité à vie longue. Les engins conçus par l’Andra pour aller positionner les colis dans les alvéoles sont aussi capables de les récupérer.  Afin de répondre à la demande sociétale, le Parlement a demandé que le stockage qui sera effectué au Centre industriel de stockage géologique soit réversible pendant au moins 100 ans.  Qu’entend-on par stockage réversible ? Il s’agit de disposer d’une solution sûre sur le long terme, tout en laissant la possibilité aux générations d’après de revenir sur les décisions prises aujourd’hui. Le stockage est conçu pour pouvoir être fermé de manière progressive. Le planning des différentes étapes de fermeture (scellement d’une alvéole, puis d’une autre, puis de la galerie d’accès à ces alvéoles et enfin du stockage) pourra être modifié au cours de l’exploitation de Cigéo. L’idée est de laisser la possibilité aux générations futures de décider quand ils ferment, quelle partie du stockage et à quel rythme.
Si sa construction est autorisée, le projet Cigéo pourrait accueillir les premiers déchets en 2025 après une série de rendez-vous définis par la loi.
Dominique Bré
Crédits photos : Dominique Bré

 

Commentaires

  • ZABOWSKI
    • 1. ZABOWSKI Le 15/04/2014
    je vousdrai visiter le cite de l'andra BURE 55

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